L’usage équilibré d’une ressource est une nécessité: « trop et trop peu gâtent tous les jeux », dit-on. Cela se vérifie dans le domaine de l’alimentation. Qu’en est-il de l’usage des écrans? Des points de vue extrêmes s’opposent, des questions de vocabulaire divisent. Voici quelques éléments pour réfléchir à l’exposition aux écrans… et mieux en profiter.
1. « Collectif Surexpositions Ecrans« 
Les professionnel.le.s de l’enfance qui ont signé la charte du collectif relèvent que des enfants passent beaucoup de temps devant les écrans et constatent qu’un nombre croissant de jeunes présentent des retards importants dans le développement de la communication, du langage et de la cognition.
Tribune publiée dans Le Monde le 31 mars 2017:
« Nous, professionnels de la santé et de la petite enfance, souhaitons alerter l’opinion publique des graves effets d’une exposition massive et précoce des bébés et des jeunes enfants à tous types d’écrans : smartphone, tablette, ordinateur, console, télévision. »
Proposition: discuter quelques citations tirées de cette tribune (faites-vous des constats similaires? tirez-vous les mêmes conclusions? qu’en pensez-vous?)
- « Captés ou sans cesse interrompus par les écrans, parents et bébé ne peuvent plus assez se regarder et construire leur relation. »
- « Les explorations du bébé avec les objets qui l’entourent, soutenues par les parents, sont bloquées ou perturbées, ce qui empêche le cerveau de l’enfant de se développer de façon normale. »
- « Ces deux mécanismes – captation de l’attention involontaire et temps volé aux activités exploratoires – expliquent à eux seuls les retards de langage et de développement, présents chez des enfants en dehors de toute déficience neurologique. »
Un élément à relever dans la troisième citation: « expliquent à eux seuls ». Quels autres facteurs pourraient – devraient? – être pris en compte?
Le collectif propose des conseils concrets pour mieux gérer les écrans dans le foyer. La méthode des 4 pas est proposée sous forme d’affiche. Proposition: favoriser 4 temps sans écrans, soit:
- pas d’écrans le matin
- pas d’écrans durant les repas
- pas d’écrans avant de s’endormir
- pas d’écrans dans la chambre de l’enfant
- Que pensez-vous de ces 4 domaines? Lequel vous semble le plus important à préserver?
- Proposeriez-vous un autre temps important à vivre sans écrans?
- Au contraire, quelle idée pourriez-vous envisager pour vivre un temps constructif et joyeux devant un écran?
Proposition 1:
Proposition 2:
Proposition 3:
Un des thèmes abordé par le collectif est intitulé « autisme virtuel ». L’utilisation de ce terme fort a suscité beaucoup de réactions. Le collectif précise ce qui est visé: un « faux autisme secondaire aux écrans ». Mais le terme demeure, et pose question:
Pensez-vous qu’il est adéquat d’évoquer une forme d’autisme qui pourrait être en lien avec un usage non équilibré des écrans?
Autre mot fort parfois utilisé en rapport avec les écrans: l’addiction. Qu’en pensez-vous?
Une vidéo en ligne s’adresse aux parents d’enfants de 0 à 4 ans. Le Dr Anne-Lise Ducanda, médecin de PMI (Essone), signataire de la charte du collectif, explique ce qu’elle constate, et elle interroge: « comment agir face aux écrans? »
2. Emission « Envoyé spécial » disponible en ligne
Présentation de cette émission du 18 janvier 2018 sur le site de France TV.
Enquête à propos des alertes données par des scientifiques en France et aux Etats-Unis.
Les écrans seraient dangereux pour les enfants. Ils agiraient sur leur cerveau et influeraient sur leur concentration.
Des personnes qui ont travaillé dans le domaine expliquent comment à leurs yeux des industriels cherchent à entretenir une addiction aux jeux sur smartphone.
Extrait 1:
Dès le début du reportage, une ambiance particulière est présente. Que pensez-vous du tapis musical qui est utilisé? La présentation vous semble-t-elle la plus objective possible?
Malheureusement, tout est dramatisé à l’extrême dès le début du reportage: musique d’ambiance sombre, mise en image qui fait penser à une enquête difficile, au combat d’une personne « seule contre tous », à des secrets qu’il faudrait dévoiler. En fin de reportage, l’usage d’une « caméra cachée » fait également très cliché. Quant aux propos rapportés (« volés » à un vendeur dans un grand magasin), trois questions: cette personne s’exprime-t-elle à titre personnel? le fait-elle au nom de toutes et tous ses collègues? est-ce que les propos de cette personne représentent vraiment l’avis de la société qui l’emploie?
D’autres extraits de cette émission sont proposés sous point 5. Mais avant cela, pour équilibrer quelque peu le propos, il est utile de s’arrêter et de confronter les points de vue, grâce aux deux contributions suivantes.
3. Débat sur le plateau de Arrêt sur images
Extraits à discuter:
« Dans les reportages consacrés à la question, un mot revient régulièrement, celui d’addiction. Mais selon Serge Tisseron, qui définit l’addiction par le syndrome de sevrage et le risque de rechute, les écrans ne peuvent être comparés à des drogues. »
« Pour Tisseron, l’important est de savoir si l’usage des écrans est accompagné ou pas. « Ce qui est caricatural n’est pas suivi », prévient-il. Et de conclure: « Maintenant, qu’est-ce qu’on fait? » »
4. Autre point de vue critique à propos du lien addiction – écrans
Un très intéressant article publié sur le blog de Mediapart propose des questions complémentaires. Notamment:
« Le problème provient-il de l’existence du produit qu’il faut remettre en question, réprimer, et considérer comme dangereux (nocif), ou de la personne elle-même, et du problème psychologique qui l’amène à dépendre de lui ? »
L’article conclut en notant que, pour le traitement d’un autisme avéré, l’usage d’écrans peut apporter, au contraire, quelque chose de positif.
5. Autres extraits de l’émission « Envoyé spécial » à discuter
16 extraits sélectionnés, à visionner et à discuter, en prenant en compte l’appel de Serge Tisseron à se garder des caricatures et à valoriser le relationnel. Il est bon de se rappeler aussi que d’autres points de vue sont possibles en rapport avec les termes « addiction » et « autisme ».
Les extraits ci-dessous sont proposés dans l’ordre chronologique de l’émission. Pour un visionnement partiel, l’extrait numéro 5 ne dure que 19 secondes et pose une question intéressante en rapport avec les jeux sur écrans comparés aux autres jeux.
Extrait 2:
Un enfant de 3 ans a un problème de scolarisation. Une première rencontre avec le docteur a été difficile. L’enfant ne peut pas s’endormir sans smartphone. Sa maman est d’accord de tenter l’expérience de couper les écrans (télévision et smartphone). La deuxième rencontre avec le docteur a lieu 2 jours après la première. Extrait.
Extrait 3:
Quelques chiffres (malheureusement présentés sans références qui permettraient de contrôler leur fiabilité) à discuter.
Extrait 4:
Belle opportunité de discuter les habitudes de personnes adultes. En quoi ce que la maman dit de son comportement mériterait d’être remis en question, tant pour elle que pour son enfant?
Extrait 5:
Faites-vous le même constat que le docteur? Qu’en pensez-vous?
Extrait 6:
Bébé + sein ou biberon +… écran?
Extrait 7:
L’auteur de Glow Kids, un livre qui évoque une addiction aux écrans, propose une explication aux phénomènes constatés.
Extrait 8:
L’application Snapchat propose des récompenses sous forme de flammes quand un envoi est réalisé consécutivement durant plusieurs jours à un contact. Une publicité est présentée et commentée en direct dans le cadre du reportage de France TV:
Que penser des récompenses proposées par les réseaux sociaux – des « likes », des « coeurs » ou des « flammes »? Peuvent-elles susciter et/ou renforcer une habitude?
Extrait 9:
Témoignage intéressant d’un jeune qui explique la tension vécue entre envie d’éteindre son téléphone portable et pression de ne rien rater.
Extrait 10:
Une étude à propos de la sécrétion de dopamine lorsqu’une récompense sous forme de « like » est perçue.
Extrait 11:
Que se passe-t-il du côté des entreprises qui gèrent les grands réseaux sociaux? Une réponse proposée par un docteur neuro-économiste:
Extrait 12:
Quand le co-fondateur de Facebook explique ce qui a été visé dès l’origine…
L’émission cite également un autre cadre de Facebook qui s’est exprimé de manière forte en public et dans les médias.
Extrait:
« Chamath Palihapitiya, ancien vice-président en charge de la croissance de l’audience du réseau social, dit ressentir une «immense culpabilité» pour ce qu’il a aidé à construire. Plusieurs anciens salariés sont très critiques. »
Il déclare (vidéo) que « les gratifications en boucle à base de dopamine que nous avons créées sont en train de détruire la société. » Il se sent coupable d’avoir participé à l’élaboration de ce système, et il déclare qu’il n’utilise pas cette « M… », comme il la qualifie désormais, et qu’il ne veut pas que ses enfants l’utilisent.
Extrait 13:
Max Stossel, ancien des startups actives dans le développement des réseaux sociaux, a réalisé un manifeste pour appeler au changement: This panda is dancing. Extrait.
Dans l’émission de France TV, Max Stossel déclare: « Il y a une différence entre ce que nous voulons vraiment et ce que nous faisons. » Qu’en pensez-vous?
Extrait 14:
Avez-vous déjà entendu cette expression: « Quand c’est gratuit c’est toi le produit »? Explication.
Les entreprises inventent des stratégies pour capter l’attention et pour retenir les personnes afin qu’elles passent du temps sur les plateformes tout en y laissant des traces (données, choix, « ce qui est regardé ») qui sont vendues aux annonceurs.
Question: estimez-vous qu’en utilisant des plateformes gratuites, nous offrons à des entités du temps, de l’attention, du temps de cerveau disponible?
Extrait 15:
Partie de publicité commentée dans le reportage:
La publicité originale peut être visionnée en anglais ici.
Comment les enfants sont-ils représentés dans cette publicité?
Quelles autres publicités visuelles pourriez-vous citer qui mettent en scène des enfants (affiches, presse, TV, web)?
Extrait 16:
En fin d’émission, un mot de conclusion avec une invitation à lever un peu les yeux des écrans et à aider d’autres personnes à le faire.
Voir aussi sur ce blog medialogue.online:
- la règle des 3 – 6 – 9 – 12 proposée par Serge Tisseron
- quelques ressources « les écrans et nous«
- article « moi, mes écrans et les autres«
- un tableau à discuter et une idée de charte à écrire